COVID-19: La Coronaïa en Côte d’Ivoire
La pandémie mondiale du Coronavirus COVID-19 frappe de plein fouet mon pays. A ce jour, selon le dernier bilan, nous en sommes à 165 cas confirmés avec 4 guéris et 1 mort. C’est trop ! Cette situation crée donc une psychose au sein de la population avec son corollaire de fausses informations faisant courir tout le monde dans tous les sens. Cette psychose s’est transformée en véritable paranoïa que j’ai nommée « LA CORONAÏA ». Voici mon journal sur cette crise sanitaire que traverses mon pays, avec ma femme et notre bébé.
Il est 20H, ma femme se précipite pour mettre RTI 1. Elle est la plus inquiète de nous tous, je la sens dépérir de jour en jour. Mais elle n’arrête pas de se gaver des mauvaises nouvelles annonçant le nombre de morts par le coronavirus à travers le monde. Elle connaît les derniers chiffres et en tremble. Elle a raison, elle a une santé tellement fragile ! Je m’efforce de la rassurer, je lui dis qu’elle n’a rien à craindre : peine perdue, elle angoisse heure après heure. Mes tentatives pour l’empêcher de suivre l’actualité restent inefficaces.
Le bébé rampe dans tous les sens, il est très excité. Sa nounou même a jeté l’éponge, elle l’observe de loin, l’air blasée. Les premiers titres du journal télévisé s’affichent : 03 nouveaux cas confirmés portant le nombre à 168 dont 04 guérisons et 01 décès. Ma femme étouffe de colère, elle s’en prend au monde entier : moi, le bébé, le gouvernement, la nounou, notre grande fille, les voisins qu’elle soupçonne de ne pas se protéger ou respecter les mesures d’hygiène, elle est au bord de l’hystérie. A cette allure, le virus en lui-même ne me fait plus peur, ma préoccupation c’est ma femme qui déprime. Cela aussi fait partie des corollaires de cette sale pandémie. Elle voit le virus partout, rampant par terre, sur le mur, sous le lit.
Elle est très stricte sur les mesures d’hygiène :
lavage systématique des mains chaque deux heures, interdiction formelle de
toucher à l’enfant quand je rentre du travail avant « une désinfection totale »
(MDR), port de gants et cache-nez obligatoire pour les sorties, gel
hydro-alcoolique à portée de main, etc. Pffff je n’en peux plus !
Elle a déjà fait des provisions dignes d’une survie
en bunker lors d’une guerre nucléaire. Maintenant elle parle de rentrer au
village. Mes histoires drôles ne la font plus rire. Elle refuse même de
décrocher le téléphone. Cette psychose, cette paranoïa commence moi-même à
m’épuiser. Elle veut le confinement maintenant et tout de suite. Elle veut se
procurer tous les supposés remèdes qui circulent sur internet. Sa dernière
trouvaille : les feuilles de neem. Il faudrait des communiqués réguliers pour
sensibiliser les populations sur l’utilisation des remèdes prescrits par les
rumeurs.
Elle n’est pas la seule dans ce cas, de nombreux hommes et femmes semblent avoir perdu la tête face aux chiffres que débitent les médias. On se suspecte, on se soupçonne, on se méfie de tout. Vivement que cette coronaïa prenne fin !